Le 29 mars 2022. – Le budget du Québec 2022-2023 a été déposé le 22 mars 2022. À six mois des prochaines élections, le gouvernement de la CAQ a misé sur des mesures individuelles (le fameux chèque de 500 $), oubliant l’importance d’adopter des mesures à long terme pour renforcer le filet social et soutenir les personnes laissées pour compte dont celles qui ont des difficultés de santé mentale.
En février 2022, le Réseau communautaire en santé mentale (COSME) avait déposé un mémoire au ministre des Finances dans le cadre des consultations prébudgétaires. En préambule de son mémoire, le COSME a rappelé certaines réalités préoccupantes de la conjoncture :
- La pandémie a eu de graves conséquences sur la santé mentale de la population;
- Les conditions de vie des personnes se dégradent, particulièrement celles des personnes plus vulnérables;
- La hausse du coût de la vie frappe de plein fouet la population générale et les communautés;
- Le sous-financement des programmes sociaux a des répercussions néfastes sur le filet social;
- L’aide sociale et le salaire minimum sont maintenus à des niveaux indécents, ce qui accroît la pauvreté.
Après l’analyse du budget, il apparait que nos recommandations n’ont pas trouvé écho auprès du gouvernement et que nos préoccupations ont été peu écoutées.
Parmi les grands enseignements, on retiendra que :
- la proportion du budget allouée à la santé mentale diminue en importance;
- un nouveau Plan d’action gouvernemental en matière d’action communautaire (PAGAC) 2022-2027 est annoncé et des sommes de 1,1 G$ y sont rattachées;
- 149 M$ d’argent frais pour l’ensemble des organismes communautaires sont indiqués;
- des montants PSOC pour des secteurs spécifiques apparaissent : violence conjugale, égalité hommes-femmes, hébergement jeunesse;
- l’Indice des prix à la consommation (IPC) pour les organismes communautaires en santé et en services sociaux affiche une hausse moindre.
La santé mentale peu favorisée dans le budget
Si l’on s’intéresse au budget consacré à la santé mentale dans le budget 2022-2023, nous pouvons constater :
- une baisse du pourcentage du budget consacré à la santé mentale parmi l’ensemble des dépenses de programmes du MSSS. Il passe ainsi de 6,7 % en 2021-2022 à 6,4 % en 2022-2023. Rappelons que le COSME recommande de relever cette proportion à 10 %.
- un investissement moindre en santé mentale par rapport à l’année précédente. Le budget alloué à la santé mentale représente 1,802 G $ en 2022-2023, ce qui représente une hausse de 138 M $ par rapport à 2021-2022. Au cours de cette dernière année, le budget présenté affichait un montant de 1,664 G $, et était en hausse de 147 M $ par rapport à 2020-2021. Pour 2022-2023, le COSME recommandait plutôt de doubler les crédits à la santé mentale en les faisant passer à 294 M $. On est loin du compte.
- très peu de détails sur l’utilisation des ajouts en santé mentale, se contentant de citer l’amélioration des services et renvoyant au Plan d’action interministériel en santé mentale (PAISM) déposé plus tôt dans l’année. Le COSME préconisait plutôt que le budget 2022-2023 alloue aux ministères concernés par le PAISM, les montants requis pour la mise en œuvre de programmes de soutien au revenu, d’accès au logement, d’éducation aux adultes, de participation aux études et d’intégration en emploi.
Un effort pour le financement des organismes communautaires
La bonne nouvelle de ce dernier budget est la confirmation que le nouveau Plan d’action gouvernemental en matière d’action communautaire (PAGAC) 2022-2027 verra le jour, et que des sommes y sont rattachées. Rappelons qu’un nouveau PAGAC se fait attendre depuis 15 ans par le milieu communautaire, et que la CAQ promet sa sortie depuis deux ans. Dans le budget 2022-2023, on mentionne que 1,1 milliard de dollars sur cinq ans sont alloués à la mise en œuvre du PAGAC 2022-2027.
On peut saluer les efforts du mouvement d’action communautaire, qui ont permis une importante mobilisation dans la dernière année. On souligne particulièrement la contribution du RQ-ACA et de la campagne Engagez-vous pour le communautaire.
Le dernier budget prévoit des investissements de 117 M $ pour 2022-2023 pour l’ensemble des 5000 organismes communautaires financés par divers ministères.
Malgré tout, le budget donne très peu de précisions sur la répartition des nouvelles allocations aux organismes communautaires en santé et services sociaux dans le cadre du Programme de soutien aux organismes communautaires. Pour les 3000 organismes relevant du MSSS, les crédits sont en hausse de 89 M $ et totalisent 911 M $. Le budget du PSOC augmente ainsi de 10,9 % en 2022-2023.
Pour 2022-2023, le PSOC général sera rehaussé de 37,1 M $ et des rehaussements sont prévus pour des secteurs spécifiques (lutte contre les violences conjugales, ressources d’hébergement pour jeunes). En revanche, on ne voit pas la trace des 15 M $ destinés aux organismes communautaires en santé mentale qui furent annoncés dans le Plan d’action interministériel en santé mentale en janvier dernier.
D’autres préoccupations du COSME peu entendues
Les recommandations que le COSME avaient formulées auprès du ministère des Finances lors des consultations prébudgétaires rejoignaient d’autres préoccupations comme :
- la révision du système d’aide sociale et des programmes pour soutenir les personnes à faible revenu;
- le transfert canadien en matière de santé mentale;
- les problèmes de surprescription de psychotropes pour l’ensemble de la population.
Le budget 2022-2023 effleure certains sujets, sans toutefois répondre à nos préoccupations.
Nos impressions générales du budget 2022-2023
De manière générale, on constate un vent d’austérité camouflé sous le couvert de «l’amélioration de la performance». On retrouve dans ce budget 2022-2023 :
- des engagements peu ambitieux en matière de logement, outre d’interpeller davantage le privé pour le développement de logements sociaux.
- aucune réforme des programmes sociaux ni du programme d’aide sociale.
- un cadeau de 500$ aux citoyens et citoyennes, sans mesures structurantes pour faire face à l’inflation et l’augmentation fulgurante du coût de la vie.
- un budget qui n’amorce aucun virage pour l’environnement et la justice climatique.
- des sommes importantes investies dans le Fonds des générations en vue de l’atteinte de l’équilibre budgétaire.
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